Le cercle vicieux de la peur et de l’extrémisme

Internet. Un mot qui désigne un réseau dimensionnel et planétaire unique, mais qui a une connotation négative dans l’inconscient d’une partie des couches de la société. Pour certains, ce mot exprime l’ignorance et la bêtise, pour d’autres les réseaux sociaux et le narcissisme exacerbé, ou encore la domination américaine sur le monde… L’un des grands paradoxes du début de ce siècle est précisément l’Internet et la vision mitigée que la société en a.

Pourquoi ce réseau mondial et décentralisé, qui n’a pour seule raison d’exister celle d’être un lieu de libertés, d’échange et de partage à une échelle globale, peut-il être considéré de manière à la fois négative et aussi étriquée ?

La peur de la société

La première chose est que l’Internet, malgré lui, inquiète, voire même, fait peur. Tout d’abord, parce qu’il s’agit d’une chose peu connue, or l’être humain réagit à l’inconnu par la peur qui conduit souvent à l’agressivité. Alors que nous devrions faire preuve de curiosité et d’audace vis-à-vis du réseau, nous en avons peur et n’osons ne rien y faire, préférant laisser faire ceux qui s’y connaissent. Une chose qui est très dangereuse, car le refus de connaître une chose nous entête à mal la considérer, sans parler qu’une telle ignorance volontaire mène à la naïveté vis-à-vis des dangers qui peuvent aussi la caractériser.

Les élites détenant le pouvoir et le savoir ont également peur de l’Internet, car il est leur concurrent le plus direct et la remise en cause de leur pouvoir. À ce titre, ils font tout pour le dénigrer et alimenter les peurs et méconnaissance que nous avons vis-à-vis de l’Internet. Dans leur discours, le réseau mondial est au mieux un repaire de no-life acculturés, au pire, un réseau de criminels à mettre incessamment sous peu derrière les barreaux.

Quand la peur mène à l’extrémisme

S’inquiéter d’une chose peut mener à des chemins dangereux, parfois extrémistes. Et pour l’Internet, comme pour bien d’autres choses, ce constat est très flagrant. Il y a notamment l’extrémisme élitiste, qui consiste à attaquer systématiquement l’Internet et ses acteurs afin d’alimenter les peurs et la méfiance constante vis-à-vis du réseau. À leur prétendue lumière, ils opposent ce qu’ils considèrent comme étant une anomalie génétique dans leur monde parfait et conformiste. Ils font passer l’Internet pour un lieu dangereux, où les pires choses arrivent, tenu par des ignorants et des criminels en tous genres.

Les conséquences de cela sont l’arrivée de comportements extrémistes au sommet des structures étatiques qui tentent de contrôler l’Internet au nom de prétextes alimentés par ces peurs. Ainsi, le contrôle total de l’Internet serait nécessaire au nom de la lutte contre la criminalité et au nom de la sécurité nationale, comme si les cibles annoncées se baladaient dans la partie visible de l’Internet, alors qu’elles naviguent dans des zones plus sécurisées et bien plus secrètes, où l’internaute lambda n’y va jamais (ou alors y arrive par accident). Sans parler que derrière, l’état devient paranoïaque et considère tout humain présent sur l’Internet comme un criminel en puissance.

L’extrémisme des classes dominantes se produit lorsqu’elles s’aperçoivent que leur pouvoir est en train de leur échapper. Elles se montrent alors de plus en plus répressives pour tenter de rester sur leur trône qui leur revient (paraît-il) de droit divin. Cependant, le principe de la démocratie qui est l’un des fondements de l’Internet et de nos sociétés modernes est que ce soit le peuple qui décide de sa destinée, sans être conduit par une minorité prétendument supérieure. Cette minorité voit son pouvoir contester et lui échapper et personne ne la pleurera quand elle rendre ce qu’elle n’aurait jamais dû s’accaparer.

Internet : un univers infini

L’Internet est-il humain ou naturel ? La réponse pourrait sembler évidente, mais avec le temps, le réseau s’étend de plus en plus et nous en perdons le contrôle. Sa croissance est exponentielle et ses possibilités sont infinies ; nous pouvons l’utiliser comme bon nous semble sans autre contrainte que la technique et la morale. On parle souvent par analogie du cyber-espace pour désigner l’Internet ; il est vrai qu’il s’agit d’un espace, mais il est bien plus que cela.

Un multivers

Le réseau mondial qu’est l’Internet est plus qu’un simple média, c’est un univers à lui tout seul. Une caractéristique qui lui permet de rester indépendant tout en engendrant la méfiance envers lui-même, car considéré comme étranger, avec tous les fantasmes qui en découlent. Les caractéristiques propres de l’Internet font de lui un autre univers, avec d’autres référentiels, d’autres constantes fondamentales, d’autres lois… À ce titre, il rentre bien dans la théorie des multivers. En quoi est-il différent de l’univers dans lequel nous nous mouvons depuis près de 5 millions d’années ? Récapitulatif sous forme de tableau :

Univers Internet
Date de naissance 13,5 milliards d’années Années 60
Propriétés fondamentales Forces fondamentales Esprit humain et signaux électromagnétiques
Structures Galaxies, systèmes planétaires… Câbles, serveurs, ordinateurs…
Unités Distance (m), temps (s)… Distance et temps (ms)…

Comme tout univers, l’Internet n’a pas de centre et ne dispose pas d’une organisation hiérarchisée. Ses propriétés font qu’il est un univers réel purement humain et qu’il évolue naturellement selon la mentalité humaine, pour le meilleur comme pour le pire. On ne peut pas considérer l’Internet comme un simple média, c’est un non-sens total. Mais le fait qu’il soit un autre univers distinct de celui où se meuvent les êtres humains ne doit pas être un motif pour ne pas se soucier de son intégrité.

Une infinité

L’une des caractéristiques fondamentales d’un univers est son caractère infini. Les possibilités d’action sur l’Internet ne sont limitées que par la seule capacité technique. La technologie atteint de nos jours un tel niveau que l’on peut y inventer chaque jour de nouvelles applications ou de nouveaux concepts. La capacité de l’Internet à stocker et à faire transiter des informations est aujourd’hui infinie et permet d’y faire le meilleur comme le pire. Ce caractère infini est en réalité celui de l’esprit humain, qui a une capacité illimitée de pensée créative. À l’image de la pensée de l’Homme, l’Internet n’a ni début, ni fin, mais forme un ensemble extrêmement varié de choses et de pensées.

Il existe un semi-paradoxe à tout univers : malgré leur caractère infini dans l’espace, ils ne semblent pas l’être dans le temps. L’Internet vivra au moins aussi longtemps que les Hommes et pourra peut-être même leur survivre. Cependant, si l’on voit les différentes hypothèses sur l’évolution de l’Univers, on peut s’apercevoir que se sont les forces qui permettent de maintenir sa structure qui seront à l’origine de sa disparition. Il pourrait en être de même avec l’Internet, mais quand un tel événement pourrait-il survenir ? Réponse encore inconnue, même si les différents scandales de ces derniers mois nous permettent d’en deviner la cause probable.

Qu’est-ce qu’un internaute libre ?

L’année 2013 aura été celle de l’explosion d’une véritable bombe au sein de l’Internet. Si l’on soupçonnait et l’on savait depuis longtemps que les états du monde entier tentaient d’espionner les internautes pour savoir ce qu’ils faisaient sur le réseau, on ignorait l’ampleur de l’opération. Le fait de savoir que de nombreux états nous espionnent ou sont susceptibles de nous espionner nous amène à réfléchir sur le statut de l’internaute libre.

Les internautes et l’Internet

La plupart des internautes sont insouciants et inconscients de la réalité de l’Internet et des dangers qui s’y meuvent. Ces qualificatifs désignent deux des trois catégories d’internautes les plus courantes (la troisième étant celle des avertis conscients). Les insouciants sont ceux qui naviguent sur l’Internet sans vraiment connaître sa dimension réelle, son essence, quels en sont les dangers et les avantages réels ; pour eux, il s’agit plus d’un utilitaire et d’un banal moyen de communication plus efficace et plus pratique que tout ce qui a été fait jusqu’à présent. Les inconscients sont ceux qui ont une certaine connaissance de l’Internet, qui sont au courant des problèmes de vie privée liée aux programmes d’espionnages ou aux cookies, mais qui ne se sentent pas concernés, car n’ayant rien à cacher, ils n’ont rien à se reprocher et donc rien à craindre.

La dernière catégorie, celle des avertis conscients, sont ceux qui prennent au sérieux les problèmes de vie privée liés à l’Internet et font en sorte que leur navigation sur le réseau se fasse dans le respect de leur vie privée. On retrouve dans cette catégorie, le groupe des cybernautes, c’est-à-dire les activistes qui agissent sur l’Internet dans le but de défendre le réseau et ses utilisateurs et qui veillent à ce qu’il reste en dehors du contrôle d’une entité illégitime.

Richard Stallman à Wikimania 2005

Les cybernautes veillent sur l’Internet libre et sur les libertés de ses utilisateurs (Elke Wetzig, CC-BY-SA 3.0)

Un internaute n’est pas toujours libre

Naviguer sur Internet donne un sentiment de liberté sans limites, car il n’y a en apparence aucune force de l’ordre ou aucune loi explicite indiquant ce que l’on peut faire et ne pas faire. S’il est exact qu’aucune loi d’aucun état ne peut réellement s’appliquer de manière légitime sur le réseau du fait de sa dimension mondiale, les états utilisent quelques moyens pour contrôler les agissements de leurs citoyens. Pour savoir ce qu’un internaute fait sur le réseau, il y a plusieurs moyens, légaux comme illégaux, relativement efficaces. Sur le plan légal, les services de renseignement peuvent exiger que les entreprises détenant des données de connexions (les FAI, les entreprises proposant des services sur le web…) leur fournissent ces données. Le cadre de telles requêtes peut être légal (sans être pour autant légitime, une loi sécuritaire fondée au mépris de libertés individuelles n’est jamais légitime), mais peut aussi être illégal.

L’internaute n’est en réalité pas vraiment libre s’il laisse les états ou des entreprises infiltrer ses données de connexion qui sont une véritable mine d’or d’informations personnelles. Peu importe la finalité de la récupération de ces données, l’internaute perd de nombreuses libertés individuelles qui sont intimement liées à la vie privée. L’un des exemples les plus emblématiques est la liberté de penser, car si les états s’autorisent à tout savoir de ce que vous pensez tout haut comme de ce que vous pensez tout bas, ils peuvent alors conserver ces données qui pourraient vous être reprochées un jour.

La plupart des pays concernés par l’Internet démocratisé à grande échelle sont des démocraties certes, mais l’Histoire démontre à maintes et maintes reprises qu’une démocratie n’est pas éternelle et qu’elle peut basculer vers un régime dictatorial de manière progressive. Par conséquent, les informations que le régime démocratique a récolté sur vous pourront être utilisées par le régime dictatorial qui suivra qui pourra les utiliser contre vous.

Sommes-nous libres dans un univers surveillé ?

L’Internet existe sous de nombreuses formes ; certaines sont étroitement surveillées, d’autres le sont moins. La surveillance de l’Internet dépend à la fois de ce que les états recherchent, mais aussi de leur capacité technique à infiltrer le réseau, qui n’est pas illimitée. Bien entendu, nous n’avons pas une vraie liberté à naviguer dans un univers surveillé, car ceux qui vous surveillent savent ce que vous faîtes et peuvent vous contrôler en conséquence. Votre liberté n’est qu’apparente et masque la réalité qui est que la personne ou l’organisation qui vous connaît sait exactement ce que vous pensez, ce que vous aimez ou ce que vous voulez faire ; à partir de là, vous êtes aisément manipulable.

Paranoïa dites-vous ? Pourtant, les cookies que les sites web envoient sur votre ordinateur sont des incitations à consommer qui sont d’autant plus irrésistibles qu’elles vont dans le sens de vos goûts ; par ce biais, l’entreprise derrière le site tente de manipuler votre consommation pour que vous achetiez une chose que vous n’aviez pas prévu d’acquérir. Ainsi, vous n’êtes pas libres de choisir l’objet que vous voulez acquérir et le moment où vous voulez l’acquérir, car c’est l’entreprise qui le fait à votre place.

L’internaute libre dans tout ça ?

Logo du réseau Tor

Le réseau Tor : un moyen très efficace de naviguer librement sur l’Internet sans être surveillé (Tor Project, CC-BY 3.0)

Au milieu de toute cette imbrication de moyens de surveillance, la notion d’internaute libre a t-elle encore un sens ? La réponse est oui ; mais pour y parvenir, il faut y mettre les moyens techniques et psychologiques. Sur le plan technique, il faut empêcher les intrusions par le biais de l’utilisation de logiciels libres quand vous utilisez l’Internet. Deuxième point : empêcher l’interception des données que vous recevez par l’usage des connexions sécurisées (HTTPS, SSH…). Troisième point : consulter et supprimer régulièrement les cookies qui sont installés sur votre ordinateur par les sites web que vous consultez (fonctionnalité présente dans le navigateur web). Un autre moyen très efficace pour empêcher le pistage de vos connexions : l’utilisation du réseau Tor qui vous attribuera une IP intraçable à chaque que vous vous connectez ; il faut savoir cependant que naviguer avec Tor est comme utiliser la fonctionnalité de navigation privée, ce qui signifie que vous n’avez pas d’historique de connexion ou de cookies d’installé.

Si un internaute procède à la mise en œuvre de ces moyens techniques, qui ne sont pas difficiles à installer, il est déjà plus libre. Mais pour être totalement libre, il lui faut aussi franchir une barrière psychologique. Tout d’abord, il doit prendre conscience que les libertés individuelles dont il jouit ont été acquises par de grands combats et qu’il est de sa responsabilité à veiller à ce que personne, et pas même les états, ne vienne les lui enlever, même pour un motif qui pourrait paraître légitime. Il doit aussi comprendre que l’on n’agit pas en fonction des sentiments et que les états jouent sur le sentiment de la peur pour justifier leurs agissements. Enfin, il doit savoir dire non aux tentations et à ce qui pourrait paraître être des fatalités, mais qui n’en sont pas si on a la volonté de se battre.

L’internaute libre est au final celui qui est capable de dire non, aussi bien psychologiquement que techniquement, à ce que l’on tente de nous imposer par des moyens pervers. Mais il est aussi celui qui prend conscience que l’Internet appartient à l’Humanité et que les états n’ont pas à y faire leur loi de manière arbitraire et qu’il est de son devoir d’être humain de faire en sorte à ce que l’Internet reste un réseau mondial libre.

Jeux vidéo : des œuvres culturelles à part entière

Icône représentant un vaisseau spatial attaquant un astéroïde

Le jeu vidéo : une oeuvre culturelle méprisée (David Vignoni, GNU 2.1)

Les élitistes bien-pensants de la culture ont des critères spécifiques pour décider de ce qui peut rentrer ou non dans le champ de la culture. Il semble que dans ces critères, il existe le critère de la non-production en rapport avec l’informatique et Internet. À ce titre, les jeux vidéos ne seraient pas des œuvres culturelles, mais juste des produits bons à jeter et à dénigrer, pour eux qui sont dans la Haute Sphère culturelle qui voit tout et qui sait tout.

Le jeu vidéo est une œuvre culturelle

Nier que le jeu vidéo est une œuvre culturelle est un énorme contre-sens, mais c’est aussi tellement conservateur. Le jeu vidéo fait partie des œuvres culturelles de notre temps et c’est à ce titre qu’il n’est pas considéré comme tel, car c’était mieux avant ; la doctrine dans l’élite culturelle est que seuls nos ancêtres étaient capables d’innover en matière de culture et que nous, pauvres mortels (souvent sans le titre ou le diplôme qu’il faudrait pour prétendre à être un acteur de la culture), sommes des incapables. Le jeu vidéo est pourtant une œuvre culturelle, mais une œuvre où le contact entre l’œuvre et son public sont différents dans la forme par rapport à ce que l’on pouvait avoir avant. Cependant, le fond est le même, un joueur qui manipule une manette de console ou une souris et un clavier est en contact avec l’œuvre au même titre que le spectateur qui admire une statue ou un tableau ou bien un lecteur qui lit un livre.

Le jeu vidéo dispose de son univers propre, né de l’imagination de ses créateurs et inspiré de bon nombres d’œuvres antérieures. Sa dimension culturelle est égale aux autres œuvres, car il développe et transmet une pensée, tout en alimentant l’imagination de ceux qui sont en contact avec lui. Le fait que les jeux vidéo soient plus axés sur certains pans spécifiques de la culture, qui ne sont pas considérés comme tel par l’élite bien-pensante, ne lui retire pas cette dimension culturelle. Le jeu vidéo est en réalité une nouvelle approche de l’appropriation d’une œuvre où le joueur doit la manipuler et s’y immerger pour la découvrir.

La production culturelle la plus aboutie

De toutes les productions d’œuvres culturelles, celle des jeux vidéo est sans nul doute l’une des plus avancées et l’une des plus adaptées à la révolution de l’Internet. La conception d’un jeu vidéo nécessite de nombreuses étapes, car le produit sera utilisé par les joueurs qui doivent apprécier le scénario, les graphismes et les mises en scène, mais également la jouabilité et de nombreux autres paramètres propres au jeu vidéo. Pour connaître les attentes des joueurs et pour pouvoir s’améliorer, les concepteurs n’ont d’autre choix que d’interragir avec ceux qui seront concernés au premier chef par le produit : les joueurs eux-mêmes. Dans la vie connectée d’aujourd’hui, une œuvre ne peut être créée que grâce à l’intéraction entre le concepteur de l’œuvre et ses utilisateurs.

Le jeu vidéo est l’une des catégories des œuvres culturelles qui ne s’est jamais aussi bien portée avec l’arrivée et la démocratisation de l’Internet, car il était déjà adapté à la sociologie nouvelle qu’apportait le réseau. A contrario, de nombreuses autres catégories qui ne permettait que peu ou pas l’intéraction concepteur-public ont dû commencer à revoir leur copie. Ce que l’Internet a permis, c’est l’accessibilité directe entre le créateur d’une œuvre et son public, grâce aux techniques et aux applications du réseau. Le jeu vidéo fonctionnait déjà selon cette pratique et l’arrivée du réseau mondial n’a fait que démultiplier cette puissance. Ainsi, là où certains modèles de création ont dû se remettre en question, celui du jeu vidéo a seulement été catalysé.

Une œuvre immersive

On reproche souvent aux jeux vidéo d’être trop immersifs ou de brider l’imagination des jeunes. Ce sont des faits, on ne peut guère les contester, mais ces reproches sont en partie injustifiés. Toute œuvre culturelle un tant soit peu réussie finie par immerger celui qui la contemple, et les jeux vidéo n’échappent pas à cette règle. Des affaires malheureuses montrent que les films ou les séries TV peuvent avoir autant d’influence sur une personne qu’un jeu vidéo si elle y est trop immergée. On note cependant que les jeux vidéo (avec quelques autres œuvres) semblent plus immersives que d’autres productions culturelles ; quelle en est donc la cause ? Le temps. Un jeu vidéo est très prenant, bien plus que n’importe quelle autre œuvre culturelle du fait de la richesse qu’il peut contenir et des possibilités et opportunités d’action qu’il offre. Ce qui le rend très immersif, c’est que son univers est vaste et qu’il peut être utilisé sous diverses formes par le joueur.

Est-ce que le jeu vidéo bride l’imagination des jeunes ? C’est une phrase que l’on retrouve dans certains arguments où l’on tente d’opposer les jeux traditionnels réels et les jeux vidéos. L’argument ? Le fait que ce soit visuel, le joueur n’a plus à imaginer comme il le ferait dans un autre jeu ou même s’il lirait un livre. Argument non-recevable, car il s’appliquerai aussi à toutes les œuvres visuelles (et elles sont nombreuses). Une chose à prendre en compte est qu’il y a deux types d’approches imaginatives de l’œuvres : pendant la contemplation et après la contemplation. Les critiques de manque d’imagination liée au jeu vidéo ne prennent en compte que la première, omettant (volontairement ?) la seconde qui est la plus importante. En effet, les jeux vidéo apportent au joueur un nouvel univers qu’il peut retranscrire, modifier ou juste s’en inspirer pour créer son propre univers en aval, un état de fait très courant qui est omis dans ce cas.

Acquisition de compétences et de pratique

Le jeu vidéo peut permettre d’acquérir ou d’améliorer des pratiques et des compétences (ici, l’anticipation) (Grm wnr, DP)

On considère uniquement le jeu vidéo pour un côté juste ludique, chronophage, qui serait à l’origine de la baisse du niveau intellectuel des jeunes… Bref, les jeux vidéos sont l’anti-thèse même de l’école. La réalité est bien différente : le jeu vidéo permet l’acquisition de compétences et la formation d’une certaine logique qui peut parfois se révéler utile dans la vraie vie. On pourrait rétorquer que savoir comment atteindre la plate-forme super-dure pour choper un bonus spécial dans un coffre n’est pas très utile dans la vraie vie, sauf que pour atteindre la-dite plate-forme, il faut faire preuve de logique et cet exercice fait souvent appel à un temps de réaction et à un synchronisme bien dosé pour parvenir à l’objectif, choses qui sont très utiles dans la vie de tous les jours (ex : l’anticipation quand on conduit un véhicule).

On pourrait multiplier les exemples et tous feraient état de fait que la plupart des pratiques et des compétences acquises plus ou moins inconsciemment dans les jeux vidéo servent dans la vie réelle. Mais pourquoi les jeunes n’en font-ils donc pas usage ? Peut-être parce que au lieu d’apprendre aux jeunes à se servir de ce qu’ils ont acquis au fil de leurs parties, on les culpabilise en leur faisant entendre qu’ils flinguent leurs études, que leur niveau intellectuel régresse à cause des jeux et qu’ils doivent arrêter… Au final, cela amène à un refermement des jeunes sur eux-mêmes vis-à-vis de ces thématiques et à un regroupement entre joueurs qui peut parfois amener à de bonnes brochettes de kikoo-lol avec un QI en-deçà de celui d’un poulpe lobotomisé.

Pour conclure, il faut cesser avec l’élitisme culturel qui marginalise le jeu vidéo et empêche les possibilités éducatives qu’il pourrait avoir de se développer. Cependant, il ne faut pas oublier que tout doit être bien dosé pour éviter les excès et ses conséquences désastreuses et le jeu vidéo ne fait pas exception à cette règle.

L’internaute : cet être immatériel si réel

Quand on parle d’Internet et de législation à appliquer sur le réseau, on invite et on parle des grandes sociétés qui feraient le web comme Facebook, Google et consors. Mais il y a toujours les grands oubliés de l’Internet, ceux qui vivent sur le réseau et qui le font tourner : les internautes.

Qu’est-ce qu’un internaute ?

Question importante. Pour les médias, ils forment une communauté à part qui fonctionne indépendamment de la société, ils sont vus au mieux comme des personnes étranges et au pire comme des gens faisant partie d’une secte. Dans tous les cas, les internautes sont vus comme des gens bizarres, à marginaliser et bons pour l’asile psychiatrique. Si les médias tiennent un tel discours, c’est tout simplement parce qu’ils perçoivent Internet comme un concurrent dangereux et donc ses acteurs (les internautes), doivent être traités avec mépris et traînés dans la boue.

La réalité est bien plus complexe et différente que la vision du discours simpliste et haineux des médias. Par simple définition, l’internaute est l’utilisateur d’Internet ; ainsi, toi qui est en train de lire le billet de ce blog, peu importe le moyen (courriel, flux RSS, site web…), tu es de fait un internaute. Il est très hypocrite de la part des médias de mépriser les internautes qui sont les lecteurs exclusifs de leurs sites web.

L’incarnation de l’Homme dans la dimension Internet

L’internaute navigue au sein du réseau dimensionnel qu’est Internet, il est celui qui vit et qui fait vivre ce réseau. Considérant qu’Internet est une dimension parallèle et interagissant avec ce qui est communément et faussement nommé la vie réelle, l’internaute est en réalité un être propre qui est sur le réseau l’image de l’humain auquel il correspond dans la vie réelle. Pourquoi une telle distinction ? Parce que l’internaute se déplace dans une dimension nommée le cyber-espace différente de la dimension dans laquelle l’être humain se trouve. Le cyber-espace est souvent considéré comme immatériel, ce qui est à la fois vrai et faux. Cette dimension a ses lois propres, ses référentiels et ses caractéristiques qui ne peuvent être mises en comparaison avec ceux de notre dimension ; cependant, le cyber-espace existe par le biais de signaux électro-magnétiques circulant à travers des câbles, des satellites, des serveurs ou encore des ordinateurs. Toute l’architecture du numérique et d’Internet détermine le cyber-espace.

Comme je l’ai indiqué la semaine dernière, Internet est un réseau qui ne peut être contrôlé par aucune personne, organisation ou état, car il a été conçu pour cela. Il est totalement indépendant et fonctionne de manière anarchique avec seulement des principes qui basent les relations entre les internautes. Ces derniers sont les acteurs et les habitants d’Internet, une dimension fascinante dans le sens où elle est la toute première dimension parallèle à la nôtre avec laquelle nous pouvons interagir. Nous y avons nos avatars qui agissent selon une certaine pensée qui peut être différente et aussi semblable à celle que nous avons dans la vie réelle. Internet n’est pas peuplée d’êtres humains, mais d’internautes qui sont l’incarnation directe des humains dans une dimension différente de la leur.

Internaute et cybernaute

Au sein des internautes, on peut distinguer deux grandes catégories : les internautes passifs et les cybernautes. Les premiers sont les utilisateurs lambda qui sont pour la plupart plus des consommateurs d’Internet et qui utilise le réseau pour faire des achats, communiquer via les réseaux sociaux, partager leurs photos… sans vraiment être conscients de la portée de leurs actes. Les cybernautes sont les membres qui participent activement à la vie d’Internet par le biais de la participation au sein de communautés autour de projets ou d’actions de défense du réseau. Les cybernautes forment les communautés que l’on peut croiser sur des projets comme Wikipédia ou OpenStreetMap, mais sont aussi au sein d’organisations comme la Quadrature du Net, le Parti Pirate ou l’Electronic Frontier Foundation.

L’importance des cybernautes est essentielle, car ce sont eux qui ont permis à Internet d’être ce qu’il est et qui le défendent contre les tentatives de contrôle par les états et les lobbys. Ce sont eux qui défendent la vie privée sur Internet et qui ont mis en place les procédés de cryptage de données. L’Internet libre est entièrement le fait des cybernautes et s’il arrive encore à subsister, c’est grâce à eux. Les internautes passifs sont peu au fait de la réalité d’Internet et de sa structure et il est nécessaire pour eux de les comprendre afin qu’ils puissent utiliser Internet et non le consommer simplement, car Internet existe grâce à eux, mais ils existent aussi grâce à Internet ; à la même manière qu’une nation n’existe que si elle a un peuple, tout comme un peuple ne peut réellement exister qu’avec une nation.

Nous sommes tous des internautes potentiels ou existants et il faut prendre conscience d’exister au sein de la dimension Internet, sans cela, nous ne faisons que subir et consommer une chose qui peut offrir un bien meilleur potentiel. Les médias parlent d’Internet et des internautes avec mépris, car ils sont ceux qui leur ont fait perdre leur monopole sur l’information, ainsi qu’une partie de leur crédibilité.